Avec l’intensification des précipitations, les normes hydrologiques en Afrique de l’Ouest ont besoin d’être révisées
Confrontée à une explosion des besoins d’investissements en infrastructures de tous types (routes, ponts, habitations et industries, barrages), les pays d’Afrique de l’Ouest doivent mettre à jour les normes hydrologiques qui servent de base au dimensionnement de ces différents ouvrages, dans un contexte de changements climatiques et environnementaux qui rendent obsolètes les études réalisées au cours de la deuxième moitié du XXième siècle.
En ce qui concerne la composante climatique, la principale évolution observée depuis le début du XXIième siècle est une intensification du régime des précipitations, caractérisée par une persistance de la réduction du nombre d’épisodes pluvieux (par rapport à ce qui prévalait dans les années 1950-1970 où de nombreuses études de dimensionnement de barrages ont été réalisées), conjointement à des intensités plus fortes lorsqu’il pleut (Panthou et al., 2014).
D’autre part, les systèmes hydrologiques sont soumis à une forte pression anthropique qui engendre souvent une augmentation du potentiel ruisselant des sols, soit en lien avec les pratiques agricoles (défrichements et encroûtements) (Amogu et al., 2015), soit du fait de l’urbanisation. Par ailleurs, différents types d’aménagements sont réalisés, qui modifient l’écoulement des cours d’eau, que ce soit en milieu rural (grands barrages) ou urbain. Ces différents facteurs ont impacté fortement les régimes hydrologiques moyens mais aussi les extrêmes (débits de crues et d’étiages).
Les enjeux scientifiques de la revisite des normes hydrologiques sont doubles. D’une part, l’amélioration des connaissances théoriques et les développements méthodologiques qui en découlent, doivent permettre d’améliorer les méthodes existantes. D’autre part, la forte non-stationnarité qui résulte du changement global nécessite d’être prise en compte dans l’analyse des séries hydro-météorologiques et dans le processus de dimensionnement qui en découle : en effet, dans la mesure où la notion de niveau/période de retour n’a plus vraiment de sens dans un cadre non-stationnaire, c’est notre conception du dimensionnement (essentiellement basée sur cette notion) qui doit être revue. L’existence de dispositifs d’observations à long terme, notamment ceux développés dans le cadre du SNO AMMA-CATCH, constituera une source d’informations précieuse pour ce travail.
Conscient de la nécessité de réviser les concepts et outils pour le dimensionnent d’ouvrages en Afrique de l’Ouest, le Programme Hydrologique International (PHI) de l’UNESCO a pris l’initiative sur ce sujet, en intégrant bien que différentes connaissances scientifiques restent à acquérir, et qu’il faudra les décliner en termes d’outils et de méthodes pour l’ingénierie du dimensionnement. Enfin, il est également extrêmement important qu’une politique de formation volontariste à ces nouveaux outils soit mise en place afin d’en favoriser la diffusion et l’appropriation par les communautés scientifiques et les services opérationnels susceptibles de les mettre en œuvre.
Aux côtés de l’UNESCO, les chercheurs des laboratoires HSM, et IGE s’engagent sur ces thématiques de recherche et de formation dans la région.
Mis à jour le 5 janvier 2022